Tuberculose infantile : simplifier le diagnostic pour mieux soigner
Publié par IRD Occitanie, le 21 mai 2025 130
Des techniques simplifiées vont rendre le diagnostic de la tuberculose pédiatrique plus accessible, au profit de l’efficacité des traitements.
La mise au point de méthodes plus simples pour diagnostiquer la tuberculose chez les jeunes enfants pourrait sauver de nombreuses vies dans les pays du Sud. Elle permettrait de rendre les tests plus accessibles, au plus près des populations exposées, et d’initier plus tôt un traitement efficace. Les scientifiques de l’IRD1 et leurs partenaires ougandais et zambiens sont sur la brèche.

Nous avons travaillé à l’évaluation de trois méthodes de préparation des échantillons de selles, dont la mise en œuvre simplifiée peut être effectuée dans les centres de santé, pour améliorer la disponibilité des diagnostics de la tuberculose. Et deux d’entre elles viennent d’être validées par l’OMS », explique Manon Lounnas, biologiste IRD au sein de l’unité MIVEGEC.
Le diagnostic de la tuberculose reposait jusqu’ici sur la recherche de la bactérie responsable dans le crachat, mais se heurtait à la difficulté de faire expectorer les jeunes enfants.
© IRD - Michel Fromaget
Maladie encore meurtrière
Infection des poumons par le bacille de Koch, la tuberculose sévit encore beaucoup dans les populations des pays du Sud. Et elle continue de faire de nombreuses victimes chez les enfants vulnérables, porteurs de comorbidités comme le paludisme ou la malnutrition. L’infection se soigne avec des antibiotiques, mais le traitement est lourd, et doit être durablement prolongé. Il est donc délicat de prendre la décision d’engager une telle thérapie sur de simples signes cliniques. Le diagnostic formel reposait jusqu’ici sur la recherche de la bactérie responsable dans le crachat. Mais il se heurte à la difficulté de faire expectorer les jeunes enfants. Des alternatives reposent sur l’aspiration nasopharyngée ou sur la technique de l’aspiration gastrique, très invasive sur les petits malades. Cette dernière consiste à analyser le contenu de l’estomac, où se retrouvent des bacilles présents dans les expectorations avalées.
Bacilles dans les selles
Face à ces difficultés pour prélever les jeunes enfants, les scientifiques ont eu l’idée d’aller rechercher les traces des bacilles ingérés dans les selles. Il s’agit ensuite de caractériser la présence du pathogène par biologie moléculaire, ce qui est possible dans beaucoup de centres de santé du Sud, équipés de machines à PCR automatiques2. Mais l’obstacle à cette technique demeure la préparation des échantillons de selles, qui nécessite une formation poussée des techniciens et la centrifugation, alors que ces centres de santé sont le plus souvent dépourvus de centrifugeuse.
Les scientifiques et cliniciens ont ainsi évalué trois méthodes différentes de préparation simplifiée des échantillons3 — ne nécessitant pas de centrifugation —, en conditions réelles dans des hôpitaux en Ouganda et en Zambie. Ces techniques variées, mais toutes caractérisées par leur mise en œuvre facile et leur faible coût, sont développées par différentes équipes de recherche dans le monde, dont une à l’hôpital de Montpellier4. Il s’agissait d’évaluer leur fiabilité à détecter le bacille, comparée à celle de la technique de préparation des selles par centrifugation, mais aussi à celle du prélèvement par aspiration nasopharyngée. Les résultats obtenus ont montré que ces trois nouvelles méthodes ont une sensibilité similaire et équivalente à celle des méthodes déjà éprouvées. Elles disposent aussi d’une excellente spécificité.

Les procédures simplifiées sont particulièrement adaptées aux environnements à ressources limitées dépourvus d’équipement lourd, d’alimentation électrique en continu, et permettent de se passer de consommables onéreux comme les tubes Falcon utilisés lors de la centrifugation. Cette simplification rend les méthodes de dépistage de la tuberculose plus accessibles et plus facilement déployables, contribuant ainsi à améliorer le diagnostic de la maladie à tous les niveaux du système de santé », estime Ivan Mugisha Taremwa, responsable du laboratoire de diagnostic de la tuberculose, au MSF-Epicentre Mbarara Research Centre, en Ouganda.

L'expérimentation des nouvelles méthodes de préparations des échantillons dans des hôpitaux d'Afrique de l'est a montré leur validité opérationnelle.
© IRD - Manon Lounnas
Simplicité plébiscitée
L’étude comprenait également une évaluation de la faisabilité concrète de ces méthodes, en tenant compte des ressources matérielles et des compétences disponibles dans les centres de santé locaux. Les techniciens de laboratoire impliqués ont ainsi donné leur avis sur les trois techniques qu’ils avaient pu éprouver. Et c’est la plus simple techniquement, la méthode Simple one step (SOS), qui a emporté leurs suffrages. Sur cette base, l’OMS a recommandé l’usage des deux méthodes SOS et OSF dans son manuel à destination des laboratoires, en laissant aux utilisateurs le choix entre l’une et l’autre. « La généralisation de ces outils devrait permettre d’améliorer le dépistage précoce de la maladie et, de ce fait, l’efficacité de la prise en charge thérapeutique », conclut Manon Lounnas.
par Olivier Blot, IRD le Mag'
- Des unités mixtes de recherche TRANSVIHMI, GHIGZ et MIVEGEC
- Largement déployées par les programmes nationaux de lutte contre la tuberculose, ces machines sont très simples d’usage dès que l’échantillon est convenablement préparé.
- Optimized sucrose flotation (OSF), Stool processing kit (SPK) et Simple one step (SOS)
- OSF
CONTACTS
Manon Lounnas MIVEGEC (IRD/CNRS/Université de Montpellier)
Ivan Mugisha Taremwa MSF-Epicentre Mbarara Research Centre, Ouganda
Source : https://lemag.ird.fr/fr/tuberc...
Crédit photo bandeau : IG