Cuisinons la médiation : retour sur l’apéro #9 des Brasseurs de sciences
Publié par Nicolas Berton, le 27 novembre 2018 2.5k
Brasseurs de sciences : le retour ! Après une courte trêve estivale, l’équipe a remis la machine en route mardi 18 septembre 2018 à La Part du Hasard . Nous sommes venus nous mettre en appétit avec l’un des sujets de conversation préféré des Français : l’alimentation !
Une trentaine de « Brasseurs », trois intervenants :
- Chantal BERTRAND, docteure en Biologie-Santé-Nutrition-Métabolisme, gérante et animatrice de "LudiSciences", nous amène à observer le côté « chimique » des aliments via des ateliers de cuisine moléculaire.
- Florence FLIES, coordinatrice de l'association "Pro-Portion", s’intéresse aux restes de nos repas en promouvant la réduction du gaspillage alimentaire, ainsi que la valorisation de nos déchets.
- Marc FAUROUX, metteur en scène et comédien au sein de la compagnie "Paradis-Éprouvette", travaille, quant à lui, plus sur l’imaginaire et le rapport sensuel que nous apporte le fait de préparer et de consommer les aliments.
En quelques mots ...
1. Les ateliers de médiation sont, pour Chantal, un outil pour questionner nos actes, surtout concernant l'alimentation.
2. En tant que comédien Marc assure ne pas vouloir se substituer à l’enseignant dans le cadre scolaire. Il apporte un autre outil et fournit les documents qui lui permettront d’aller plus loin en classe. C’est à cet endroit que s’arrête son expertise.
3. En 3 mots justement ! Si nos intervenants avaient un ingrédient à donner, quels seraient-ils ?
- Florence --> Plaisir
- Chantal --> Quotidien
- Marc --> Critique (qu’est-ce que j’aime et comment je le défends)
4. Le message que l'on veut passer lors de notre intervention est essentiel. Pour Florence c'est souvent celui-ci : « En tant que citoyens nous sommes acteurs et responsables de ce que l'on mange et de ce que l’on laisse comme déchet. »
Ok, ça m'intéresse !
Un court sondage réalisé en début de soirée nous le confirme : nous ne sommes pas tous de grands cuisiniers, mais nous aimons tous manger ! Se mettre à table (ou ailleurs !) reste encore un plaisir universel, un besoin essentiel dans nos vies. C’est un sujet idéal de médiation, car il permet d’intéresser une majorité, mais l’on est loin de s’imaginer l’ensemble des domaines auquel il est lié.
Cuisiner, pour prendre goût aux sciences
Dans les ateliers de cuisine moléculaire de "Ludiscience" animés en partie par Chantal BERTRAND, vous apprendrez à cuisiner des « Spaghettis au chocolat blanc, framboise ou menthe », ou encore des « Œufs au plat et frites en trompe l'œil » . L’idée est d’apporter un regard différent sur ce qui entre dans nos estomacs via des recettes et expériences originales. Créons des bonbons en forme des fruits de saison, découvrons l’influence des colorants sur le cerveau, ou ce que subissent les aliments subissent après avoir été ingérés.
Que ce soit en classe avec les enfants ou lors de festival avec des adultes, l’aspect ludique des rencontres permet aussi de se questionner sur les préjugés. Non, la cuisine moléculaire, n’est pas de la magie, c’est de la science ! Non, si c’est « chimique », ce n’est pas forcément mauvais pour la santé !
Des temps de sensibilisation et de prévention sont aussi intégrés au sein des ateliers pour lutter contre la malbouffe ou encore évaluer l’énergie utilisée pour apporter nos aliments jusqu’à nos assiettes.
Goûter le monde autour de nous… sans le gaspiller !
La prévention et la sensibilisation autour de l’alimentation, Florence FLIES en a fait son métier. Auprès de restaurants d’entreprise, de groupes scolaires et médico-sociaux ou encore en festival, l’association "Pro-Portion" met un point d’honneur à réduire le gaspillage alimentaire.
Mais attention gaspiller ne réside pas seulement dans le fait de ne pas finir son plat. Il faut aussi penser en amont de la chaîne : à tous ces aliments jetés par leur manque d’esthétisme, aux quantités de nourriture inutilement surévaluées ou encore au manque de valorisation de nos déchets.
Un projet est lancé en 2018, "Goûter le monde autour de moi !".
Le principe : 1 collège et 3 producteurs (fruit/légumes, fromage, miel… et même huître !) et 5 temps.
1. Le travail sur les sens lorsque nous nous nourrissons.
2. La rencontre avec les producteurs locaux.
3. L’échange avec un(e) diététicien(ne) pour comprendre l’impact de notre alimentation sur notre santé
4. L’expérimentation culinaire afin de trouver une recette qui nous permettra de servir à tous des aliments rejetés tel que la carotte. La préférez-vous plutôt sucrée ou salée ?
5. Le partage de cette expérience sur un temps final festif avec les parents et les autres élèves.
La cuisine-théâtre, ou comment raconter une histoire en coupant des légumes
Comme nous le dit Marc Fauroux, « les artistes témoignent beaucoup de leurs histoires propres ». Ce n’est sans doute pas pour rien que cet ex œnologue-sommelier-cuisiner-serveur …et végétarien, s’est attelé à l’écriture de diverses pièces sur l’alimentation aux titres évocateurs tels que « Miam Miam » ou encore « Histoire à manger ».
C’est aujourd’hui, avec sa compagnie "Paradis éprouvette" , qu’il apporte au salon "Régal" (ex-Sisqa) sa touche culturelle en proposant de la « cuisine-théâtre » dont le concept lui a été soufflé au festival D’Avignon. Les spectateurs plus ou moins grand, revisitent les univers du goût au sein d’un salon où certains rencontrent pour la première fois les animaux vivants qu’ils ne connaissaient que dans leurs assiettes !
Je veux en savoir plus !
"Un classique au sein des brasseurs : parlez-nous de vos échecs (et en passant :ce que vous en avez appris !"
Florence --> Prendre en compte TOUS les acteurs de l’intervention…Surtout les participants !
Petit ennui, lors d’une de nos interventions, tout le monde était partant excepté… les élèves !
"Vous êtes contents d’être là ? Non ! Super on va passer une heure et demi ensemble !"
Il faut prendre en compte que lorsque les participants comprennent réellement ce en quoi consiste l’activité et qu’ils se sentent impliqués, leur regard changent et ils en redemandent.
Chantal --> Réaliser beaucoup de test des expériences en amont, histoire d’éviter les imprévus.
Expérience sur la digestion. Des tubes remplis d'amidon sont sensés s'éclaircir en présence d'amylase ou de salive; pas cette fois-ci ! Après avoir repris nos esprits, l’expérience à été d’autant plus enrichissante, car elle nous a permis de réfléchir avec les élèves sur la raison de l’absence de réaction et d’émettre des hypothèses. En bref, de développer une démarche scientifique.
Marc --> Trouver l’équilibre entre l’aspect sensible, l’imaginaire et le contenu scientifique
Nos premières représentation extrêmement didactiques (et « chiantes ») suivaient les consignes de l'un des grands partenaires de la Sisqa. Nous avons ensuite appris à nous faire confiance dans notre statut de comédiens pour repartir vers le « sensible », le chimérique, le loufoque tout en ajoutant des éléments scientifiques que nous allions nous-mêmes chercher.
Nous ne nous substitutions pas à l’enseignant dans le cadre scolaire, nous apportons notre outil et lui fournissons les documents qui lui permettront d’aller plus loin en classe et c’est à cet endroit que s’arrête notre expertise.
"On retrouve beaucoup de militantisme autour de notre alimentation. Comment rester objectif lors de vos actions ? "
Florence --> Lancer le débat ou la réflexion en s'adaptant à son public.
Militant, on l’est souvent. Avec une classe de 30 élèves pour une heure, nous ne pouvons passer que des message qui amènent à réfléchir sur nos actes. Le gaspillage ce n’est pas moins manger, c’est mieux manger ! Parmi les gens que je vois, quand je pose la question : personne ne gaspille. On n’ose pas s’avouer cela, surtout en public et il y a aussi le gaspillage par habitude celui qu’on ne voit pas, celui qui est sur le bord de l’assiette ici même.
J’aime surtout donner des astuces faciles sans pointer du doigt.
Astuce de la soirée : Si votre salade par exemple commence à tirer sur la fin, vous la mettez toute une nuit dans une bassine d’eau et le lendemain elle reprend de sa fraîcheur !
Chantal --> Rester dans les faits scientifiques
De part ma formation scientifique j’essaie de n’apporter que des faits apportés par les revues et articles scientifiques sur la composition réelle des produits et les bienfaits ou méfaits qui ont été analysés sur l’organisme (malheureusement on ne sait jamais ce qui est acquis scientifiquement, il faut travailler sur la recherche des sources).
Marc --> Bien délimiter son rôle
Nous ne sommes là que pour poser des questions. C’est
comme cela surtout que se voient les comédiens. Je ne suis pas légitime pour
défendre tel ou tel domaine. Le format que j’apporte permet d’amener à
réfléchir au sujet.
« L’alimentation est le thème principal de vos activités, mais vous semblez ouvrir à une multitude d’autres contenus...»
Chantal --> Aborder des notions scientifiques via l’alimentation
Nous répétons forcément plusieurs fois des notions associés à la cuisine que nous faisons ! Après l'un de mes ateliers, vous pourrez sûrement m'expliquer ce qu’est un mélange homogène ou une réaction chimique car, en plus, vous les aurez expérimenté.
Florence --> Remettre l'aliment dans son contexte
Qui dit aliment,par exemple, dit emballage, dit plastique et donc pollution. Mais l'on peut aussi réfléchir ensemble à une solution pour valoriser ce déchet. Un autre exemple, quand on mange une courgette qui vient du Kenya, il y a une grande histoire à raconter sur celle-ci par rapport à celle que l’on achète à Gragnague à 12 km de Toulouse.
Le mot de la fin sera pour Florence :
Attention l’alimentation reste un plaisir ! Lorsque l’on mange, on s’imagine déjà au prochain repas. Il faut savoir rester sur cette dimension de plaisir, de partage, de convivialité, d’échange, très française MAIS aussi omniprésent dans toutes les cultures.
3 Pitchs en guise de dessert
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Frédérique Pitout, astronome à l’IRAP, voudrait médiatiser la pâtisserie par l’astronomie, mais aussi la pâtisserie via l’astronomie. L’idée est d’utiliser la cuisine comme prétexte pour parler d’astronomie. Réaliser des sablés en forme d’étoile et former sa propre constellation voire même les colorer pour parler des températures des étoiles. Une crêpe peut parfois nous faire tellement penser à la Lune qu’on en oublierait presque qu’elle peut se manger !
Le derniers ateliers réalisé, un des enfants a dit « ah qu’elle sent bon cette constellation ». On reste dans le plaisir, des sens. Il faut savoir jouer sur les activités multi-sensorielles pour faire ancrer des connaissances.
- Audrey Bardon, chargée de communication chez Science Animation nous invitais le 13 octobre dernier à la salle du Cap pour une soirée "Sciences et séries TV", en partenariat avec l'Université III Paul Sabatier . Installé confortablement dans un canapé, les scientifiques invités nous ont amené à analyser et réinterpréter nos fictions préférées. Vous n'avez pu y participer ? Pas de soucis, nous avons le lien pour la rediffusion : ici
- Agatha Liévin-Bazin, étudie le comportement animal et pour en parler elle publie sur un blog « Le nid de pie ». Elle lance aussi une émission homonyme sur Radio Campus FM Toulouse, à vos écouteurs !
Toute l'équipe de bénévole tient à vous remercier pour votre présence et nos échanges autant sur place que sur les réseaux sociaux (#brasciences) à chacun de ces brasseurs. Elle tient aussi à remercier l'ensemble des lieux (car nous n'allons pas QUE dans des bars) qui nous accueillent pour ces apéros-médiation.
Cet article ne vous a pas suffi ? Lisez celui de La Science en passant !