À Madagascar, un programme de santé fait reculer la mortalité infantile

Publié par IRD Occitanie, le 29 octobre 2025

Dix années de renforcement du système de santé dans une région rurale de Madagascar ont permis de réduire la mortalité des jeunes enfants.

La situation sanitaire sur l’île de Madagascar est très préoccupante, et encore plus dans les zones rurales, particulièrement vulnérables. Au sud-est du pays, le district rural d’Ifanadiana bénéficie depuis 2014 d’une intervention menée par l’ONG Pivot, visant à renforcer durablement le système de santé local.


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« Plutôt que de cibler une maladie en particulier, cette intervention a pour objectif d’améliorer la santé globale de la population et de réduire la mortalité maternelle et infantile, à travers le renforcement du système de santé et la mise en place d’une couverture sanitaire universelle », explique Andres Garchitorena, épidémiologiste à l’IRD, au sein de l’unité MIVEGEC. 

Marcheurs sur un étroit chemin dans un paysage rural montagneux.

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Avec son équipe, il a suivi, entre 2014 et 2023, l’évolution de la mortalité infantile et de l’utilisation des services de santé dans cette zone de 200 000 habitants, qui affichait à l’origine l’un des taux de mortalité les plus élevés du pays. 

Beaucoup d’enfants sauvés

Parmi les actions engagées par l’ONG Pivot dans le cadre de ce programme, on peut citer l’amélioration des infrastructures, la formation du personnel, le soutien aux programmes cliniques, le renforcement de la santé communautaire, ou encore la prise en charge des frais de santé. 

Pour évaluer l’efficacité de l’intervention, les scientifiques se sont appuyés sur un large éventail de données : enquêtes bisannuelles auprès de la population, informations issues des différents niveaux de soins (communautaire, centres de santé et hôpitaux), et relevés géographiques des patients pour mesurer l’accessibilité aux soins. 
La mise en œuvre de l’intervention ne s’étant pas réalisée de manière simultanée dans l’ensemble du district, les chercheurs ont pu effectuer des comparaisons entre les différentes zones. Dans celles ayant bénéficié de l’intervention dès 2014, ils ont constaté une diminution de 30 % de la mortalité avant l’âge de 5 ans. A contrario, elle s’est aggravée dans le reste du district, suivant la tendance nationale. 
« Cela montre qu’il existe un véritable bénéfice sur la mortalité lié à l’intervention, qui s’explique par la diminution des barrières financières et géographiques et par un système de santé renforcé à tous les niveaux de soins », précise Andres Garchitorena. L’intervention a également conduit à un doublement du recours aux soins pour les maladies infantiles et adultes. 

Miser sur la santé de proximité 

L’ambition de ce programme était aussi de réduire les inégalités d’accès aux soins, un enjeu majeur dans cette zone montagneuse dépourvue de moyens de transport efficaces.
Ainsi, les recherches sur les premières années d’intervention ont contribué à mettre en lumière le rôle crucial des agents de santé communautaire – des personnes formées pour fournir des soins de base aux populations locales – dans l’accessibilité géographique aux soins. L’ONG Pivot, qui concentrait initialement ses efforts sur les centres de santé et les hôpitaux, a alors choisi d’investir plus largement dans le renforcement de la santé communautaire. 


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« Nous avons accentué la formation et la supervision des agents de santé communautaire et avons soutenu la mise à disposition d’infrastructures et d’outils nécessaires à la prise en charge rapide des enfants malades, tels que des tests de diagnostic rapide et des médicaments contre le paludisme. Grâce au renforcement de la santé communautaire, nous avons pu réduire les inégalités d'accès aux soins pour les populations les plus éloignées des centres de santé » témoigne Hobisoa Razanadranaivo, responsable de la recherche sur l’évaluation d’impact au sein de l’ONG Pivot et coauteure de l’étude.

Étendre l’intervention à toute la région

D’abord éprouvée dans une partie du district d’Ifanadiana à partir de 2014 puis élargie à son ensemble en 2021, l’initiative s’étend maintenant au-delà. À la demande du ministère de la santé malgache, l’ONG Pivot déploie depuis 2023 une version simplifiée du programme dans les deux autres districts de la région. Forte de l’expérience acquise à Ifanadiana, elle met l’accent sur la santé communautaire, le financement des soins pour les femmes enceintes et les enfants de moins de 5 ans, et la disponibilité de soins de qualité à tous les niveaux du système de santé. 
Plus d’1 million de personnes devraient, à terme, bénéficier de ce programme. « L’objectif pour les 10 prochaines années sera d’évaluer si les bénéfices observés à Ifanadiana se maintiennent lorsqu’on passe à une échelle beaucoup plus large », conclut Andres Garchitorena. 

La stabilité des financements publics et l’implication du système de santé national seront par ailleurs essentielles pour conserver ces progrès dans la durée.


par Clémentine Vignon pour IRD le Mag'

Source : https://lemag.ird.fr/fr/madaga...

Contacts : Andres Garchitorena, MIVEGEC

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