Événementiel et coopérations internationales - Retour sur le Forum Régional Sciences et Société 2025

Publié par Echosciences Occitanie, le 22 septembre 2025   1

Le Forum Régional Sciences et Société réunit chaque année une centaine d’acteurs et actrices impliqués dans le dialogue sciences-société en Occitanie afin de se rencontrer, de partager des expériences et imaginer des projets communs. L’édition 2025 portait sur le thème “Au-delà des frontières : le dialogue Sciences-Société à l’échelle internationale” qui s’est décliné à travers 10 ateliers-conférences thématiques. Retrouvez tous les comptes rendus sur cet article.

Retour sur la session “Événementiel et coopérations internationales”, avec Marie Péquignot, Directrice opérationnelle de Genopolys, Patricia Rosenthal, Trésorière du comité de coopération Castres-Huye Rwanda, et Bruno Monflier, Président du Festival d’Astronomie de Fleurance.

Face à une vingtaine de participants, ces trois intervenants ont partagé des projets ambitieux de coopération scientifique et culturelle, chacun ayant en commun l’envie d’exporter des événements français au-delà de leurs frontières. Leurs témoignages ont mis en lumière les enjeux, les leviers et les richesses d’une médiation scientifique à dimension internationale.

Mednight : une Nuit européenne des chercheur-e-s aux couleurs de la Méditerranée

Marie Pequignot a tout d’abord présenté le projet Mednight, financé par l’Union européenne, un consortium méditerranéen coordonnant diverses actions de médiation scientifique dans sept pays du pourtour méditerranéen (Espagne, France, Italie, Grèce, Chypre, Tunisie, Turquie). La Bosnie-Herzégovine est pressentie pour intégrer prochainement cette initiative.

L’objectif ? Mutualiser les ressources pour rendre la recherche plus visible auprès des publics, tout en valorisant la diversité culturelle des approches en médiation. La gouvernance du projet repose sur des visioconférences bimensuelles et une rencontre annuelle en présentiel. Chaque partenaire gère ses propres actions, financées via un budget global de 375 000 euros par an. À Montpellier, Genopolys dispose ainsi de 15000 euros, sans personnel dédié.

L’un des temps forts du programme est la Nuit méditerranéenne. L’un des principaux axes de travail du consortium étant d’augmenter la visibilité des femmes en sciences, le consortium a choisi de la nommer “La Nuit des Chercheuses de la Méditerranée” (Marie Péquignot précise que l’évènement accueille évidemment tous les métiers de la recherche, ainsi que des hommes au sein des intervenants). Ateliers ludiques, débats, speed-meetings ou encore expositions interactives y sont proposés. Le tout dans un esprit festif et accessible, qui attire familles, lycéens et curieux de tous âges (environ 500 visiteurs en 2024). La prochaine édition aura lieu le 26 septembre, dans les locaux du lycée Joffre à Montpellier. 

Le consortium a par ailleurs lancé un concours de contes scientifiques et édité un recueil traduit en neuf langues, disponible gratuitement sur le site du projet. 

Au-delà de l’événement, Mednight propose aussi des interventions scolaires, des visites de laboratoires et des actions transversales autour de la place des femmes en sciences. L’intervenante en profite pour indiquer qu’elle est ouverte aux propositions d’interventions dans l’Hérault, en particulier dans les zones rurales qui lui tiennent à cœur. 

Genopolys a également repris des actions très originales comme Mind the Lab, une opération imaginée par leur partenaire grec, consistant à réaliser des animations scientifiques dans le métro. Genopolys s’en est ainsi inspiré pour mener des actions dans des lieux insolites comme une plage ou encore une Caisse d'Allocations Familiales. 

Pour Marie Pequignot, cette collaboration a permis un véritable “changement d’échelle” des actions de Genopolys, et une ouverture à de nouvelles pratiques. La question de l’évaluation, par exemple, a été traitée de manière collective afin d’échanger des méthodes tout en adaptant aux contraintes locales. 

La Fête de la Science au Rwanda : 39 ans de liens entre Castres et Huye

Patricia Rosenthal, engagée dans l’association Sciences en Tarn et dans le comité de coopération Castres-Huye, a relaté avec émotion une aventure humaine et scientifique de longue haleine : l’implantation de la Fête de la Science au Rwanda.

Cette initiative est née d’un partenariat unique en son genre entre une ville française de 43 000 habitants et un district rwandais de plus de 400 000. Ce partenariat est né d’une amitié entre le maire de Castres de l’époque et une personne du petit village de Huye (qui comptait au départ 30 000 habitants). 

Ce lien, noué il y a près de quarante ans, a traversé de tristes périodes, fait face à une colonisation et un génocide qui ont laissé des traces immuables. Ce lien s’est donc consolidé autour d’un principe fondamental : répondre à une demande émanant du territoire partenaire. Après le génocide, les partenariats se sont stoppés, puis ont repis petit à petit, uniquement à travers des liens d’amitiés entre les associations. La vie culturelle s’était également éteinte après ces violents évènements. Porteuses de la Fête de la science dans le Tarn, Patricia Rosenthal et son acolyte Marie-Christine Bàdenas ont suggéré d’organiser l’évènement là-bas. 

Depuis six ans, des actions culturelles et scientifiques sont menées à Huye, en partenariat avec l’Institut français, le Goethe Institut, la Mairie de Castres et l’université locale. Deux villages des sciences accueillent chaque année entre 1000 et 1500 jeunes et plusieurs centaines de visiteurs. Le programme s’enrichit d’année en année : projections de films, animations scientifiques, événements artistiques et sportifs, toujours en lien avec les priorités de développement locales (sport, innovation, éducation). 

Les partenaires locaux s’occupent de toute la gestion technique, l’animation, l’obtention des autorisations… Tandis que Patricia et Marie-Christine vont appuyer la coordination, s’occuper de la coordination ou encore des logements et transports. Car Patricia rappelle que dans l’un des pays les plus pauvres du monde, il est essentiel de s’assurer que chaque intervenant aura de quoi manger ou se déplacer pour l’évènement. 

Un pont a même été jeté entre le Tarn et le Rwanda : des échanges se sont créés autour du Fab Lab, de l’observation astronomique ou de la création numérique sur le jeu vidéo Minecraft. La coopération a aussi permis de créer une médiathèque, de numériser les archives de l’hôpital de Butare, et de mettre en place des formations pour les jeunes décrocheurs.

Astronomie sous d’autres cieux : du Gers au Liban

Enfin, Bruno Monflier, fondateur du Festival d’Astronomie de Fleurance, a partagé deux projets d’essaimage de son événement à l’étranger. Au Liban d’abord, où une rencontre fortuite avec une famille libanaise a débouché sur la création du Festival d’Astronomie de Fleurance au Liban. Organisé depuis 12 ans par l’association Universciel, cet événement rassemble environ 2000 personnes autour de conférences et d’animations, malgré un contexte politique et économique difficile. Cet évènement a même essaimé dans les écoles françaises du Liban, avec plusieurs interventions organisées. 

Au Mexique ensuite, où la Noche de las Estrellas a été initiée par l’ambassade de France en partenariat avec l’Université de Mexico. Bruno Monflier y a apporté une expertise technique durant deux années avant de transmettre les clés aux partenaires mexicains. Son équipe de médiateurs est intervenue pour former les animateurs locaux. 

Puis un autre organisme extrêmement important au Mexique s'est mêlé de l'affaire : l’institut national en charge de l’archéologie. Ce dernier a proposé d’organiser la Noche de las Estrellas dans de nombreux sites archéologiques du Mexique. Imaginez le succès ! Aujourd’hui, plus de 50 sites célèbrent cet événement en toute autonomie, avec une fréquentation importante et un enthousiasme populaire remarquable.

Lorsqu’on l’interroge sur ses méthodes pour collaborer, Bruno répond que la seule méthode, c’est d’être attentif. De rester à l’écoute. Il ne s’agit pas non plus de venir organiser, mais d’être dans le partage et de laisser faire les organisateurs locaux, en leur faisant confiance. 

“Amener humblement ce qu'on a, et accepter humblement tout ce qu'ils donnent”

La discussion a souligné plusieurs points communs entre ces projets : l’importance de l’adaptation interculturelle, les bénéfices mutuels pour les partenaires, la nécessité de co-construction des contenus, mais aussi les contraintes liées à la langue, aux traductions, ou aux contextes administratifs.

Cela passe aussi par la connaissance de l’histoire du pays. Il est impossible, et même déplacé, de vouloir travailler avec une population sans avoir fait l’effort de connaître son passé ou son contexte politique. 

Les intervenants ont insisté sur une posture de coopération horizontale, fondée sur l’humilité, l’écoute du contexte local et la volonté de valoriser les compétences des partenaires. Si certains formats sont exportés avec succès, c’est qu’ils ont été transformés, enrichis et souvent recontextualisés.

Ces expériences rappellent que la médiation scientifique, même si elle parle d’atomes, d’étoiles ou de génétique, reste fondamentalement un acte de lien entre les humains.

Pour échanger avec les intervenants : 

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