L’acoustique révèle les clés de la répartition verticale de la biomasse animale marine
Publié par IRD Occitanie, le 7 février 2024 430
Une équipe franco-brésilienne - dont des chercheurs de l’UMR Marbec - s’est penchée sur les déterminants océanographiques de la structure verticale des organismes pélagiques dans l'Atlantique tropical du sud-ouest. Leurs travaux, basés sur le recours à l’acoustique et réalisés pendant la campagne ABRACOS, sont publiés dans PLOS One.
Les poissons, crustacés, mollusques ou méduses sont sensibles aux paramètres de leur environnement marin tels que sources de nourriture, niveau d’oxygène, vitesse des courants, etc. L’acoustique permet de faire le point sur les déterminants principaux de leur répartition dans la colonne d’eau.
La biomasse animale marine n’est pas répartie au hasard
Les pêcheurs en ont conscience et en tiennent compte dans leurs pratiques de pêche depuis longtemps : les poissons vont là où ils ont assez d’oxygène et de nourriture. Les scientifiques explorent cette question sous différents angles d’attaque et avec des techniques de plus en plus sophistiquées. « La dynamique océanique initie la distribution des sources de nutriments qui déterminent les producteurs primaires, et ceux-ci, à leur tour, façonnent la répartition des niveaux alimentaires ultérieurs jusqu'à ce que l'ensemble de la communauté pélagique reflète la structure physico-chimique de l'océan », résume Arnaud Bertrand, écologue à l’IRD (UMR Marbec) et co-porteur du LMI TAPIOCA auquel cette étude a contribué. Malgré cela, les études sur les interactions biophysiques à fine échelle sont rares et difficiles à réaliser. Pour en améliorer la compréhension, les auteurs ont analysé la structure verticale des variables océanographiques clés ainsi que la distribution de la biomasse acoustique à partir de données acoustiques multifréquences. Ces données fournissent des informations à haute résolution sur la distribution des diverses communautés pélagiques.
Campagne dans l'Atlantique tropical au nord-est du Brésil
Les campagnes multidisciplinaires ont été menées à bord du navire océanographique français Antea le long de la côte brésilienne sur deux saisons contrastées en termes de structure thermohaline et de dynamique des courants et de productivité. Outre les échosondeurs acoustiques, divers instruments de mesure ont été nécessaires pour acquérir les données de conductivité, température, profondeur, fluorescence, oxygène dissous, teneur en chlorophylle et vitesses moyennes des courants. « Ces données nous permettent de décrire le ‘paysage océanique’, c'est-à-dire les caractéristiques verticales des facteurs environnementaux », explique Ramilla Assunção, océanographe à l’Université fédérale du Pernambouc (Recife, Brésil). Toutes ces mesures ont été complétées par la collecte d’échantillons biologiques tels que zooplancton, méduses, crustacés, céphalopodes (calamar par exemple) et poissons. L’occasion de constater que la biodiversité est bien supérieure à celle prévue et même de découvrir de nouvelles espèces ! Cette faune se répartit de la surface de l’océan à ses profondeurs en fonction des caractéristiques des espèces, des saisons et de l’alternance jour/nuit.
Des variations verticales jour/nuit et soumises aux saisons
L’analyse de l’influence des facteurs biophysiques sur la structuration verticale de la biomasse acoustique révèle que l’intensité des courants, la stratification, la chlorophylle, et l'oxygène sont des variables prépondérantes façonnant le paysage acoustique. Cependant, leur importance relative dépend de la zone, de la profondeur, du cycle journalier et, par conséquent, des saisons en raison de la grande variabilité hydrodynamique observée entre le printemps et l'automne. L’oxygène dissous semble être un facteur déterminant uniquement dans les zones où il se trouve en moindre concentration. Cette étude des relations verticales à petite échelle favorise la découverte de migrations asynchrones : en effet, chez diverses espèces de poissons (exemple les poissons-lanternes), la population entière ne répond pas de manière synchrone aux variations journalières, seuls les individus ‘affamés’ migrant au cours d'un cycle jour/nuit donné. « Nos résultats suggèrent également que les organismes marins semblent éviter les courants forts,ajoute Arnaud Bertrand. Alors que jusqu’à présent, on estimait que la distribution verticale des organismes était contrainte par des relations biophysique simples, nous révélons une multitude de processus plus complexes et variables dans le temps et l’espace. »
Publication : Assuncao R., Lebourges Dhaussy Anne, da Silva A. C., Roudaut Gildas, Ariza A., Eduardo L. N., Queiroz S., Bertrand Arnaud. 2023. Fine-scale vertical relationships between environmental conditions and sound scattering layers in the Southwestern Tropical Atlantic. PLOS One, 18 (8) : e0284953. https://doi.org/10.1371/journal.pone.0284953
Contacts Science : Arnaud Bertrand, IRD, Marbec ARNAUD.BERTRAND@IRD.FR
Ramilla Assunção, Laboratório de Oceanografia Física Estuarina e Costeira, Departamento de Oceanografia, UFPE, Recife (Pernambouc, Brésil) RAMILLAVIEIRA@HOTMAIL.COM
Contacts communication : Fabienne Doumenge, Julie Sansoulet COMMUNICATION.OCCITANIE@IRD.FR
Source : https://www.ird.fr/lacoustique...