Des fleurs au chevet de la planète

Publié par Université de Montpellier UM, le 20 octobre 2017   1.1k

Pour guérir les sols contaminés et les eaux polluées, Claude Grison et son laboratoire ChimEco font appel aux forces de la nature. Soigner la planète par les plantes : l’idée est en pleine floraison. 

Nous sommes en 2007 et Claude Grison, chimiste, n’a encore rien d’une écologue, quand quatre de ses étudiantes en classe préparatoire aux grandes écoles lui proposent un sujet d’études original : « peut-on dépolluer les sols avec des plantes ? » Pour les aider, elle se plonge dans la bibliographie existante. « J’ai découvert les plantes sous un aspect nouveau, se souvient-elle. Dans un contexte de pollution, elles ne peuvent pas s’enfuir ! Elles n’ont que deux possibilités : s’adapter ou disparaître ». 

Pollution industrielle

Et celles qui ont eu la malchance de voir le jour sur d’anciens sols miniers doivent affronter les pires des polluants : les métaux lourds. « Ces polluants sont non organiques et donc non biodégradables. Si rien n’est fait, ils vont rester là, au cœur des sols ou des effluents contaminés, pour toujours » résume la chimiste.

Dans le Gard, à Saint-Laurent-le-Minier, Claude Grison découvre au cours de ses recherches le triste héritage des décennies industrielles : des sols empoisonnés au cadmium et au plomb, deux résidus de l’extraction du zinc. Les mines ont aujourd’hui disparu du paysage. Malheureusement, les plantes aussi : car ici, le taux de plomb dans le sol est 800 fois supérieur à la normale. En l’absence de végétation, les particules métalliques, facilement emportées par la pluie ou le vent, contaminent la région sur un rayon de plus de 50 km. 

Folies végétales

Pourtant, sur ces pentes arides, quelques plantes poussent vers le soleil leurs timides corolles. Comment survivent-elles ? Ces « hyperaccumulatrices », nommées Noccaea caerulescens, Anthyllis vulneraria ou encore Iberis intermedia, font preuve d’une étonnante stratégie d’adaptation : elles piègent les particules métalliques dans leurs feuilles, où elles les stockent. Claude Grison, qui les utilise pour dépolluer les sols de Saint-Laurent-le-Minier, les appelle joliment des « folies végétales ».

Depuis, la méthode a fait florès, et son laboratoire ChimEco a semé des plantes de même type en Crête, au Gabon, en Chine, en Nouvelle-Calédonie. Partout, ces auxiliaires précieux contribuent à stabiliser des sols très dégradés, tout en captant par « phytoextraction » les poussières métalliques qu’ils contiennent : zinc, plomb, cadmium, cuivre, manganèse, nickel ou encore palladium. Certains de ces métaux sont précieux : il ne reste alors plus qu’à aller les récupérer dans les feuilles de ces plantes extraordinaires, grâce à un traitement thermique et chimique 100% écolo.

Le laboratoire de Claude Grison se tourne aujourd’hui vers un nouveau champ de recherche : la pollution des eaux. Certaines plantes aquatiques ont en effet les mêmes capacités d’hyperaccumulation que leurs cousines terrestres. « Un problème particulièrement crucial, rappelle la chercheuse : l’eau potable devient une ressource rare, il faut la préserver. C’est devenu l’un des défis majeurs de l’humanité. »