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Dans le secret des collections de la Faculté des Sciences…

Publié par Patrimoine Université Toulouse III - Paul Sabatier, le 8 mars 2023   790

C’est en 1823 que la Faculté des sciences de Toulouse est devenue officiellement propriétaire de la collection de minéralogie de Picot de Lapeyrouse, une collection composée pendant près de 50 ans entre 1744 et 1818.  C’était un début. Et ils ne sont pas si nombreux les travailleurs de l’ombre qui depuis deux siècles ont permis de conserver et de transmettre cette collection historique de l’Université Toulouse III-Paul Sabatier et toutes les pièces qui se sont ajoutées : pas moins de 30 000 échantillons composent aujourd’hui la collection de minéralogie. Parmi ces passionnés, dans la deuxième moitié du XXe siècle, un nom émerge : Pulou. Un nom, mais deux personnes : Raymond Pulou et son épouse Geneviève Bessou-Pulou. Leurs enfants ont accepté de témoigner pour restituer ce pan méconnu de l’histoire de nos collections.

Barytine de la collection Lapeyrouse, marquée par Geneviève Bessou-Pulou.
Crédit photo : David Maugendre, Service de la Connaissance et de l'Inventaire des patrimoines, Région Occitanie

Raymond Pulou était chercheur au Laboratoire de minéralogie et de cristallographie, associé au C.N.R.S., à l’Université Paul Sabatier. Il a très tôt compris « l’intérêt scientifique et historique » de la collection de minéralogie. Très impliqué dans le projet de grand inventaire de minéralogie à l’échelle nationale initié dans les années 1970, il entreprend aussi un inventaire minutieux de notre collection. Geneviève Bessou-Pulou était officiellement son épouse, mais en réalité, elle avait aussi une formation scientifique avec de solides connaissances en botanique et en minéralogie notamment. Il va donc « trouver un petit financement » pour l’embaucher deux après-midi par semaine, « le mardi et le jeudi », pendant de nombreuses années. Elle va patiemment et minutieusement réorganiser, étiqueter, lister et numéroter les échantillons des collections. Ces opérations techniques permettent de fixer durablement l’identité d’un minéral : si l’étiquette disparaît, le numéro reste sur le minéral. Et ce travail de fourmi a payé, puisque c’est en grande partie grâce à cela que la collection Lapeyrouse a pu être identifiée et recomposée ces dernières années. L’opération d’inventaire ne s’arrête pas là : elle a actualisé les données. En effet, la connaissance n’est pas figée, gravée dans le marbre : elle a donc repris, avec le soutien de son époux, les déterminations et précisé les provenances. Cette entreprise de longue haleine est essentielle pour assurer la pérennité et la valeur d’une collection.


Les époux Pulou à Sanvensa, Aveyron en 1947
Crédit Photo : Françoise Pulou

Leurs enfants se souviennent que la vie de famille a été rythmée par cette collaboration : 

« les jours où notre mère travaillait au laboratoire, allées Jules Guesde, il fallait accélérer le déjeuner et le soir nous ne la revoyions avec notre père que vers 19h…. Au repas, notre père se montrait souvent volubile sur ses activités du jour comme pour « rejouer la séance ». A cette occasion, il n’oubliait pas de mettre en avant les tâches accomplies par notre mère et son application en tout point digne, selon ses dires, de la « bonne élève » qu’elle avait toujours été dans son cursus universitaire. Toute absorbée à sa tâche de cuisinière et à ses enfants, notre mère ne prêtait que fort peu l’oreille aux vaines tentatives de notre père de relancer à la table familiale les questions scientifiques laissées ouvertes par leur travail en commun du jour. Sans doute le couple réservait-il cet échange aux soirées passées dans le bureau de notre père où un curieux meuble symétrique octroyait une place rigoureusement identique à chacun des deux époux ».

Leur travail d’équipe ne s’est pas limité au seul inventaire de la collection. Geneviève Bessou-Pulou a également participé aux travaux de terrains et à la rédaction de plusieurs publications. Mais elle n’a accepté que dans de très rares occasions, malgré l’insistance de son époux, que son nom soit mentionné : « elle avait peur que cela soit compris comme une marque de complaisance ».

Il est temps de rendre un juste hommage à ces « petites mains »: Raymond et Geneviève Pulou ont fait un travail important, ô combien nécessaire, et souvent décisif pour la sauvegarde et la transmission de la collection de minéralogie de l’Université Paul Sabatier.

La collection  historique de Picot de Lapeyrouse est présentée dans une exposition itinérante gratuite. Retrouvez son parcours sur le site des collections patrimoniales de l'Université Toulouse III - Paul Sabatier.

Philippe Picot de Lapeyrouse se décline aussi en livre et sur un site web  en partenariat avec le Service de la Connaissance et de l'Inventaire des patrimoines, Région Occitanie.

Rédaction : Corinne Labat, Service Commun d’Étude et de Conservation des Collections patrimoniales de l'Université Toulouse III - Paul Sabatier

Crédit photo de couverture : David Maugendre, Service de la Connaissance et de l'Inventaire des patrimoines, Région Occitanie