Ciné-débat "Le Grand Bain" de Gilles Lellouche

Le Grand Bain de Gilles Lellouche [2018] : C’est dans les couloirs de leur piscine municipale que Bertrand, Marcus, Simon, Laurent, Thierry et les autres s’entraînent sous l’autorité toute relative de Delphine, ancienne gloire des bassins. Ensemble, ils se sentent libres et utiles. Ils vont mettre toute leur énergie dans une discipline jusque-là propriété de la gent féminine : la natation synchronisée. Alors, oui c’est une idée plutôt bizarre, mais ce défi leur permettra de trouver un sens à leur vie...

A l'issue de la projection du film : Intervention de Mélie Fraysse : sociologue, maîtresse de conférences à l’université Toulouse III - Paul Sabatier. Ses travaux portent sur les rapports sociaux de sexe dans les pratiques sportives et corporelles. Elle analyse plus précisément la fabrication des modèles de genre dans les médias sportifs et leurs réceptions par les publics. Après s’être intéressée à la presse sportive spécialisée elle interroge actuellement le rôle des réseaux sociaux dans la perpétuation des hiérarchies et des stéréotypes entre les sexes.

"Le sport parce qu’il fait appel à l’argument « massue » de la force physique des hommes est vraisemblablement le domaine où la différenciation hommes/femmes et la supériorité de ces derniers restent encore bien ancrées : Sports de femmes faisant appel à la grâce, à l’esthétique et à la souplesse ; Sports d’hommes exaltant la force la puissance et la performance. Et pourtant, depuis les années 60 et encore plus depuis les 30 dernières années les femmes conquièrent progressivement les bastions masculins ; le foot en étant un des plus représentatifs. Et les hommes ? Leur investissement dans les pratiques féminines est bien plus tardif et reste encore confidentiel ou alors associé à la communauté gay. « Le grand bain » nous donne une parfaite illustration de ce phénomène mais sa grande force résulte surtout dans la mise en scène d’hommes « ordinaires » et non pas d’athlètes de haut-niveau engagés pour leur intégration dans une activité jusque-là réservée aux femmes. Au-delà du monde sportif et de la natation synchronisée ce film nous montre des masculinités encore peu montrées au cinéma. Sensibles et fragiles, largement dominés par les autres hommes, disposant de corps peu athlétiques, ces nageurs incarnent de façon assumée l’opposé de la masculinité hégémonique."