La radio : média genré
Publié par Mondes Sociaux, le 13 mars 2024 380
Article de Laetitiat Biscarrat
Une grande part de ce que nous savons sur le monde passe par les médias. Or, le récit qu’ils nous en font masque la diversité des rôles, fonctions et places des femmes dans la société. Aujourd’hui encore, les médias continuent de véhiculer une représentation du monde qui est loin d’être paritaire.
A l’ère post-#metoo, les femmes continuent en effet d’y être invisibilisées ou minorées. Quelles places occupent les femmes dans l’information radiophonique ? À quels rôles sont-elles assignées ? Comment le discours journalistique perpétue-t-il les inégalités femmes-hommes ?
Depuis 1995, une enquête internationale s’efforce de mesurer à intervalles réguliers l’évolution de la présence des femmes dans les médias. Il s’agit du Global Media Monitoring Project. En effet, malgré l’affaire de la Ligue du Lol et la résurgence d’une vague féministe dans l’espace public et médiatique, les médias contribuent encore à produire et à reproduire une organisation sociale structurée par des rapports de genre inégalitaires. Ainsi, les matinales d’information radiophoniques françaises n’échappent pas à ce constat. Mais quelle place occupent exactement les femmes dans les matinales d’information ? Comment les routines professionnelles contribuent-elles à une organisation genrée du discours journalistique ?
Un média masculin ?
Les indicateurs chiffrés sont formels : la radio produit les plus grandes inégalités entre les femmes et les hommes chez les médias français. D’abord, on y trouve seulement 37 % de femmes journalistes, contre 40 % dans la presse et 52 % à la télévision. Mais ce déséquilibre n’est pas uniquement le fait d’une culture auditive qui discrimine les voix aiguëset valorise les voix graves. Les femmes qui s’expriment ou dont il est question dans les nouvelles sont elles aussi clairement sous-représentées dans les nouvelles radiophoniques (26 %), tandis qu’elles sont 30 % dans la presse et 37 % à la télévision.
En fonction des sujets traités, cette disparité fait l’objet d’une répartition inégalitaire. Les femmes qui s’expriment ou dont il est question sont très peu présentes dans les informations économiques (19 %) et sciences et santé (21,8 %) tandis qu’elles sont 39,2 % dans les sujets criminalité et violence, notamment dans le rôle de victime.
Mais l’absence des femmes de plusieurs domaines informationnels n’est
pas le seul indicateur de la reproduction des inégalités de genre à la
radio. [...]
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